Petit vade-mecum de l'apprenti propriétaire

 

 

 

Bien que la tentation de l’achat tourmente des milliers de pratiquants, les sources d’information sur lesquelles fonder une décision restent finalement très partielles et disparates. Bien des ouvrages exposent l’art de naviguer, mais le véritable vade-mecum du nouveau propriétaire, avec ses thématiques bien spécifiques, reste à écrire et je ne doute pas qu’il aurait un vrai succès tant la matière est riche et le besoin d’une synthèse évident. Tout au plus trouvera-t-on dans la littérature quelques guides des voiliers d’occasion, utiles, mais insuffisants pour se faire une idée précise de ce que la possession de ce type d’engin signifie sur le long terme.

 

Pour ma part, après m’être contenté, plusieurs années durant, de stages, locations ou navigation sur dériveur léger, j’ai fini par craquer pour un First 30, une superbe carène frégatée issue du half-tonner Impensable dessiné par André Mauric au début des années 1970.

 

Fondé sur cette expérience, ce site propose quelques pistes au plaisancier envisageant de sauter le pas de la propriété, nourries de 7 années de pratique et d’apprentissage sur le tas, et de tout ce que mes lectures et mes innombrables échanges avec des passionnés souvent bien plus expérimentés que moi, des pontons aux forums, ont pu m’enseigner.

 

Bonne lecture et n’hésitez pas à me faire part de vos remarques et propres expériences afin d’enrichir ce petit guide.

 

Ivan.


 

I - Louer ou acheter ?

 

C’est le dilemme fondateur, alors…

 

… posons calmement les termes du problème

 

Je me souviens d’un camarade de stage de voile, pratiquant expérimenté comptant plusieurs transats à son actif, professant que la location était le seul choix raisonnable s’offrant au plaisancier moyen.

 

Cette opinion, très commune, ne manque pas de fondements : budget et disponibilités requis, confiance en ses capacités et jusqu’à l’encombrement des ports se conjuguent pour décourager le candidat à l’acquisition le plus enthousiaste.

 

L’attitude de l’entourage est en particulier une inconnue redoutable. Tout à ses songes euphoriques, l’apprenti propriétaire oublie facilement que pour beaucoup (à commencer, fréquemment, par nos chères compagnes, bien que le beau sexe compte bien sûr nombre d’excellents marins), mer rime surtout avec humidité, peur, mal de mer, froid, hygiène approximative et promiscuité, … Sans compter les soins constants qu’exige ce nouvel arrivant, envahissant et dispendieux. Dans ces conditions, la location peut servir  - a minima -d’étape initiatique, une manière de sonder les cœurs et les reins avant de se lancer dans une acquisition onéreuse, qui risque de rejoindre avant peu l’armada des bateaux ventouses saturant les ports. Une épreuve qui n’a rien de désagréable, car un bateau de location, outre d’être souvent récent, voire quasi-neuf et livré prêt à naviguer, est spécifiquement conçu et pour un usage de croisière confortable. Si a contrario elle n’est pas concluante, il est bien peu probable que le séjour sur un navire moins bien pourvu suscite l’adhésion à moyen et long terme.

 

Une fois cela clairement posé, il serait symétriquement désolant d’omettre l’essentiel : le plaisir incomparable de naviguer sur SON bateau, joie qui vaut bien des sacrifices apparemment insensés, bien des efforts. Au demeurant l’achat est un choix qui offre de nombreux avantages et finalement assez rationnel à qui est disposé à se plier à certaines contraintes et servitudes.

 

Acheter c’est en effet l’assurance de :

·         se constituer une base d’expérience de première main sur l’ensemble du spectre des compétences nautiques : navigation, sécurité, réparation et entretien, …

·         disposer d’une entière liberté pour planifier ses sorties. Si le temps est mauvais, on reste au chaud sans regret, s’il se dégage impromptu, on met à la voile. La location à cet égard impose des contraintes très frustrantes

·         ne pas dépendre du consensus fragile de colocataires plus ou moins arrangeants

·         s’embarquer sur un bateau dont on connaît les forces et des faiblesses, doté d’un équipement souvent bien plus complet et à sa main que l’inventaire standard d’un voilier de location, toutes choses qui prennent leur importance lorsque le vent et la mer se lèvent plus qu’on ne l’eût souhaité

 

7 ans et près de 13 000 milles parcourus avec mon fier navire m’ont démontré sans contredit la réalité tangible de ces avantages et que l’acquisition est moins déraisonnable qu’il n’y parait. Pourtant je travaille le plus clair de mon temps en région parisienne ou à l’étranger, avec des horaires exigeants, des enfants …

 

Les ingrédients à réunir

 

Du temps

 

Première chose, concilier navigation fréquente et entretien entraîne une ponction colossale sur le temps de loisir d’une personne exerçant une activité professionnelle. Personnellement, je consacre entre 50 et 70 jours par an à mon bateau dont ¾ en mer, le reste en travaux.

 

Des sooouuuuuussss !!!

 

Plus prosaïquement encore, le budget n’est pas à la portée de toutes les bourses. On lit parfois dans telle ou telle revue que 1 500 à 2 000 € annuels suffiraient à entretenir un voilier de 9 m.  En alignant une collection respectable de « si », tous aussi optimistes, et/ou en laissant l’état du voilier progressivement se détériorer faute d’investissements suffisants, un tel montant peut éventuellement se concevoir. On croise d’ailleurs sur l’eau des désargentés passionnés qui parviennent à naviguer pour un budget étonnamment étriqué avec un sens aigu du système D, pas mal de copains bien placés et serviables, et une conception très … marine du confort à bord.

 

De fait, l’achat d’un Sangria ou d’un Fantasia permet de naviguer sur d’excellentes carènes de 7 ou 8 m pour un investissement parfois inférieur à 10 000 €. Mais l’arbre ne doit pas cacher la forêt, même (et, parfois, surtout) une coque acquise à bon compte revient cher au fil des ans. Et, à moins d’en faire son domicile, çà ne dispense d’aucune autre charge.

 

Le tableau ci-dessous donne quelques indications de budget, pour un voilier de 30 pieds environ (9 m), un port aux tarifs modérés en Bretagne Sud et un propriétaire relativement bricoleur qui ne laisse que le gros œuvre à un chantier.

 

 

Prix unitaire

Sur 1 an

Jeu complet de voiles (durée 7 ans environ)

3 000

430

Gréement courant + dormant (durée 10 ans environ)

1 800

180

Amarrage sur pontons + A/R carénage

1 800

1 800

Assurance

300

300

Entretien moteur

150

150

Révision radeau > 6 milles

400

130

Entretien intérieur (vernis, vaigrage, équipement cuisine, vache à eau, …)

250

250

Frais de port (15 escales /an à 18 € en moyenne)

270

270

Entretien peinture coque et ponts, réfection petits éclats + carénage annuels

300

300

Divers (remplacement matériel usé, défectueux ou perdu, batteries, entretien électricité, etc…)

300

300

TOTAL

4 130 €

 

Encore ces chiffres n’incluent-ils pas l’amortissement du bateau, du moteur (heureusement souvent très costaud), de la survie, des appareils divers et variés, rarement éternels. Sinon, on a vite fait de passer les 6 ou  7 000 euros. Mais rares sont les propriétaires qui poussent à ce point le souci de savoir à quel point ils se ruinent ! J

 

Pour résumer, sauf conditions réellement très particulières, je ne pense donc pas que l’on puisse raisonnablement tabler sur moins de 3 500 euros par an en moyenne (avec des variations assez marquées d’une année sur l’autre) pour maintenir en bon état un voilier de 9 m en polyester, naviguer régulièrement et le laisser au ponton dans un port correctement équipé. A mettre en balance avec les 1 500 €/semaine d’un 34 pieds en location en Bretagne Sud en juillet / août…

 

A noter pour finir que le budget d’entretien s’envole de manière totalement disproportionnée avec la taille du navire. Il est souvent admis comme « rule of thumb », que le prix et le budget d’un bateau varient avec le cube de sa longueur.  Un 35 pieds revient ainsi, grossièrement, 50 à 60% plus cher qu’un 30 pieds (je ne parle même pas des multicoques …).

 

Et aussi…

 

Un minimum d’appétence pour le bricolage est plus que recommandé. Il est certainement possible de devenir un navigateur/météorologue/stratège de premier ordre, mais quand le moteur refusera tout service un jour de pétole ou qu’un winch se coincera à 100 milles des côtes, il faudra bien mettre les mains dans le cambouis.

 

En synthèse

 

Entre l’enseignant célibataire disposant d’une maison au bord de mer, prêt à naviguer week-end et vacances, le couple de retraités, et le cadre désireux de faire une croisière de 15 jours par an avec famille et/ou amis, l’éventail des situations est très large.

 

Voici quelques critères indicatifs que je propose au vu de mon expérience et de celle d’autres propriétaires que je croise. Si l’on tombe nettement en deçà d’au moins l’un d’entre eux, je pense que la question doit être réellement pesée avec beaucoup de soins.

 

 

On remarquera que je ne mets ici aucun critère de compétences et c’est délibéré car cela me semble très secondaire par rapport au reste. Il est évidemment fortement recommandé au néophyte qui se lancerait dans l’aventure de s’attacher les services d’un ami compétent pour choisir le voilier idoine et sécuriser les premières sorties. Mais au pire, l’assistance d’un expert à l’achat (généralement exigée, de toutes façons, par l’assurance), quelques semaines de stage de voiles et de saines lectures (la voile est l’un des rares sports où l’on puisse progresser en partie par la lecture, car la compréhension des phénomènes y est fondamentale) suffisent à constituer le bagage requis pour se lancer. A chacun ensuite de choisir des conditions favorables pour se perfectionner en douceur, sans risques inconsidérés pour lui, ses équipiers et, bien sûr, les autres bateaux.

 


 

II – Trouver la perle rare

 

A garder en tête…

 

La première question préalable à toutes les autres, c’est de trouver où loger votre nouveau joujou et là, attention, c’est tout, sauf gagné d’avance. Certains professionnels proposent une place avec le bateau, mais uniquement pour une durée limitée (6 mois ou 1 an) et au prix fort. Vu les délais d’attente dans la plupart des ports, c’est loin d’être une garantie suffisante.

 

Symptôme de ces temps difficiles, il semble de plus en plus fréquent que les retraités plaisanciers cherchant le refuge de leurs vieux jours se mettent d’abord en quête d’une place de port… puis d’un bateau… puis d’une maison près du port !

Etape 1 : le bon modèle pour le bon usage

 

Une fois prise la décision, si vous avez les moyens d’acquérir un bateau neuf, félicitations, il vous reste à éplucher frénétiquement les 50 derniers numéros de V&V, Bateaux ou Voiles Magazine et trouver votre bonheur puis investir dans quelques locations pour confirmer ou infirmer votre sélection. Je n’en écrirais pas davantage, n’ayant (hélas ?) guère d’expérience en la matière.

 

Si vous êtes moins rupin et que seule l’occasion vous est accessible, la première chose à faire consiste à vous documenter soigneusement sur les modèles et les démarches. Des ouvrages, des hors séries spécialisés (type V&V) ou encore les sites Internet des annonces nautiques ou des professionnels spécialisés (« brokers ) , vous aideront à vous faire une première idée des valeurs sûres de l’occasion et des ordres de prix. Autre source très précieuse d’information, relativement récente, les sites Internet des associations de propriétaires. On y découvre des mines d’information sur un modèle, ses points forts et faibles, les soucis les plus fréquents, .... C’est aussi l’occasion de comprendre au fil des forums combien la vie d’un propriétaire est un mélange indémêlable de bonheurs et de galères.

 

Pour réduire le champ des possibles, il peut être utile de lister quelques critères simples. En, ce qui me concernait par exemple, je recherchais un voilier :

 

J’arrivais aux choix suivants (non exhaustifs), dont beaucoup d’excellents voiliers : First 28, 29, 30, 30E, 305, 310 et 32, Attalia, Kelt 8, Aquila, Rush, Gib Sea 90, Dufour 2800, Dufour 31, etc…

 

J’ai ensuite, pris des RV, organisé en tournées, visité un nombre incalculable de pontons, récupéré les essais de l’époque, discuté avec les uns et les autres. Au final, le First 30 s’est imposé comme un des bateaux présentant le meilleur compromis entre tous ces critères. J’ai fini par en dénicher un, par hasard, à Pornichet un beau dimanche de juin 2001.

 

Mon second choix était encore un Bénéteau, le First 29, un excellent cru Finot, plus habitable et récent que le 30, mais évidemment nettement plus cher. En outre les modèles que j’avais vus me déplaisaient. Par exemple, une GV sur enrouleur dans le mât, montage à qui je vois plus d’inconvénients (poids dans les hauts, risques de dysfonctionnement dans le mauvais temps) que d’avantages.

 

Etape 2 : faire un tour du marché

 

Trois voies s’ouvrent à vous pour dénicher la future 9ème merveille (la 8ème, c’est votre femme, n’oubliez pas malheureux ! J) :

  1. les professionnels spécialisés (« brokers ») présents dans les ports ou sur le web
  2. les annonces (revues spécialisées – V&V, Voiles Magazine, Bateaux, Loisirs Nautiques, Internet, tableaux des capitaineries des ports, ….)
  3. les salons spécialisés, type Mille Sabords.  Idéal pour voir et comparer un grand nombre de modèle en un minimum de temps et surtout rencontrer des propriétaires disponibles et motivés pour faire affaire

 

Si j’avais aujourd’hui un bateau à regarder, l’expérience acquise (parfois au prix fort) m’inciterait à examiner plus particulièrement les points suivants :

 

 

A examiner

Enjeu financier / sécurité

Histoire du bateau

Usage location / propriétaire /  compétition

 

Les bateaux de location, bien qu’entretenus par des professionnels ont parfois été utilisés par des équipages négligents ou peu compétents.

Les voiliers de course ou fréquemment engagés en régate sont généralement très équipés en jeux de voiles et électronique. En revanche, certains auront pu être malmenés (talonnage sur navigation rase-cailloux, navigation fréquente aux limites du matériel fatiguant la structure ou le gréement).

Etat de la carène et du pont

Faiënçage, traces de chocs, gelcoat perméable (farineux), délaminage du pont

Repeindre la coque : 2500 €

Refaire le pont : 5000  € (parfois bien davantage si une partie de la structure doit être reprise suite à un délaminage)

Réparer quelques éclats de gelcoat : 150 à 500 €

Etat des varangues (talonnage)                                          

Etat des varangues et des boulons de quille (si accessible)

La réfection d’une varangue est une intervention souvent très onéreuse et réservé à un chantier spécialisé. De plus le voilier reste fragilisé.

Etat et âge du gréement

Gendarmes au niveau des sertissures, état des cadènes, des barres de flèche

Traces de corrosion sur le mat, notamment état du pied de mât

Gréement neuf : 1 000 à 1 500 €

Mat neuf : 2 000 €

Etat et puissance du moteur

Démarrage, tenue du ralenti, passage de la marche arrière (inverseur), couleur des fumées, vibrations de l’arbre, entretien apparent (courroie, huile, filtre, turbine pompe à eau, tuyau d’échappement humide, silent blocs, presse-étoupe ou joint tournant)

Moteur neuf en échange standard : 5 000 à 7 000 €

Etat de l’électricité

Fils noirâtres, bricolages (dominos non protégés)

2 000 à 3000 € + risques d’incendie !

Etat des équipements intérieurs

Décollements des vaigrages, moisissures, surtout dans les recoins

Pourriture des bas de cloisons (traces d’humidité)

1 000 à 4 500 € selon ampleur de la surface à traiter

Pompes et canalisations

Etat de la vache à eau, des canalisations, des pompes de lavabo et des pompes de sécurité, des différentes vannes

100-600 € selon ce qu’il y a à changer

Etat des voiles

Etat des coutures, de la bande anti-UV du génois, existence de housses de protection, de réparations, texture (souplesse) du tissu

NB : l’épaisseur d’une voile (le grammage) n’est pas une garantie absolue de solidité en soi. Une chute trop lourde par exemple fatigue plus vite

Environ 3 000 € pour génois + GV semi-lattée en Dacron de bonne qualité

1 400 € environ pour un spi

Etat de l’annexe

Fuite, états des valves, états des planchers et des anneaux de remorquage

400 à 800 € (hors moteur HB)

Oeuvres vives (si le voilier est au sec)

Jeu dans le safran et l’arbre d’hélice, état apparent de la quille (corrosion), du joint de quille et des passes-coques

Très variable, potentiellement plusieurs milliers d’euros

Etat du réchaud et installation de la cuisine (respect des normes gaz)

Etat des brûleurs, des canalisations et des raccords, fixation de la bouteille (coffre extérieur)

300 à 1 000 € selon modèle, hors installation

Fonctionnement de l’électronique

Allumer le GPS et vérifier la position affichée après 3 mn

Faire un essai VHF

Faire un essai du sondeur

Faire un essai du pilote

GPS fixe (basique) : 300 €

Sondeur : 300 €

VHF fixe : 300-500 € (hors installation), portable : 150-300 €

Speedo : 200 €

Pilote barre franche : de 400 à 700 €

 

Equipement de sécurité

Inventaire complet

Date de dernière révision du radeau (demander le livret)

Etai largable : 700 €, pose comprise

Mouillage complet FOB HP 12 Kg avec 30 m de chaîne galvanisée 8 mm + 30 m de aussière ~300 €

Gilets auto-gonflants : 80 à 150 € pièce

Longes 3 points : 40 € pièce

Boîtes de fusées > 6 milles : 150 €

Radeau de survie > 6 milles > 24h 6P : 1300 €

 

Comme on peut le constater la belle électronique tant vantée par le vendeur est sympa et flashy, mais ce n’est pas le poste le plus critique, surtout pour un usage croisière, ni le plus lourd financièrement. Entre des vaigrages neufs mais une électronique vieillotte, d’une part, et un cockpit d’Airbus en guise de coin navigateur assorti de vaigrages moisis, de l’autre, il n’y a pas photo…

 

Etape 3 : l’expertise

 

Une fois dénichée la possible perle rare, il convient de la faire expertiser, étape généralement exigée par les assurances. On le lit, on le dit, on le sait : la profession d’expert ne bénéficie d’aucune garantie de qualification, n’importe qui pouvant s’improviser expert. La première étape consiste donc à  s’assurer que l’expert pressenti est reconnu, en particulier qu’il est agréé par les assurances maritimes.

 

Que peut apporter un expert en examinant 30 mn un voilier par rapport à l’avis d’un amateur propriétaire d’une unité comparable depuis plusieurs années ? De mon point de vue, dans la plupart des cas, pas grand-chose. Sauf symptôme manifeste (cloques d’acide éthanoïque dans les œuvres vives), l’osmose (humidité profonde du stratifié) ne peut être détectée que sur un bateau au sec depuis quelques mois, et un diagnostic moteur exige du temps et un matériel d’analyse spécifique, etc... Sans compter le gréement dont la fatigue est rarement apparente. Dans le cas d’une technologie un peu spécifique, un bateau traditionnel en bois par exemple, on recommande d’ailleurs souvent de s’assurer d’abord le concours d’un chantier spécialisé, qui sera plus à même d’émettre un avis pertinent sur l’état et les travaux nécessaires.

 

Cependant, l’expert est particulièrement efficace et rassurant pour un acheteur néophyte en lui évitant de passer à côté d’un défaut majeur qui entacherait gravement la valeur du navire, voire menacerait sa navigabilité. Il est en mesure d’émettre un avis sur le rapport qualité-prix proposé (même si j’ai constaté une certaine réticence à ce sujet) et s’il ne diagnostique pas un vice important, sa propre assurance prendra en charge les réparations nécessaires.

 

 

 


 

III- L’Equiper

 

On trouve de tout sur le marché de l’occasion, notamment au chapitre de l’équipement. Certains propriétaires ne reculent devant aucun gadget, quitte à transformer leur voilier en caravane sur l’eau, d’autres font dans le minimaliste. Il importe donc de se faire une idée de l’indispensable,  de l’utile et de l’accessoire pour valoriser correctement l’équipement compris dans la transaction ou, a contrario, identifier ce qui manque vraiment et qu’il faudra bien acquérir.

 

Dans tous les cas, gardez à l’esprit que tout objet, dans ce milieu extrêmement éprouvant pour les matériaux et les montages (humidité saline, vibrations, chocs, accélérations et décélérations brutales au passage des vagues) s’use bien plus rapidement qu’à terre et peut tomber en panne. En équipant son bateau au-delà de ce qui est réellement utile à la mer dans une optique de « au cas où » et de confort « comme à la maison », on multiplie les sources d’ennuis, de temps perdu et d’argent dépensé, sans compter le poids qui est rarement un atout pour la performance et la sécurité. Faire simple et sobre est souvent une façon de naviguer davantage et pas beaucoup moins confortablement.

 

Comme toujours, tout dépend de son programme.  Voici quelques repères des accessoires réellement utiles par grande catégorie.

 

Cabotage

 

Type de navigation : sorties familiales à la journée ou de 2-3 jours maximum, par temps calme ou medium, avec port et mouillage chaque soir.

·         Electronique

·         GPS « de base »

·         Sondeur (un vieux modèle à éclats fait très bien l’affaire, même si l’affichage digital est plus précis et confortable. La fonction alarme est un plus indiscutable)

·         Loch-speedo

·         VHF Fixe

·         Baromètre (plutôt électronique, moins joli mais bien plus précis et fiable en milieu marin que son homologue mécanique)

 

A l’équipement obligatoire > 6 milles, on peut ajouter en priorité

·         1 mouillage léger, cher mais pratique pour ceux qui mouillent souvent et tiennent à leurs lombaires

·         Des lignes de vie (plutôt en sangle, à changer après 5 ans, vérifier l’état des coutures)

·         Chargeur de quai

·         1 échelle de bain (facteur de sécurité autant que de confort)

·         3 bandes de ris sur GV

 

Un enrouleur avec un génois adapté (à rattrapage de creux) est réellement pratique, quoiqu’un un tantinet moins performant (perturbation du flux sur le bord d’attaque) à moins que l’on soit assuré de disposer toujours d’un équipage nombreux, compétent et motivé.

 

Croisière au large (au-delà de la bande des 20 milles)

 

Electronique

·         Pilote automatique costaud ou régulateur d’allure

·         GPS portable de secours (les pannes de GPS ou électriques ne sont pas une légende, j’en ai vu personnellement 2 cas. Quand on est en vue de côtes familières, ce n’est pas très grave, sinon…)

·         Navtex ou BLU pour la météo (le Navtex est nettement plus simple à installer, même s’il rend moins de services. Il est fiable jusqu’à 300 milles au large en Europe)

·         VHF portable étanche

 

A l’équipement obligatoire > 6 milles, on peut ajouter

·         2ème batterie

·         1 mouillage renforcé : 30 m de chaîne, 30 m de cablot

·         1 vache à eau de bonne capacité (100 l)

·         1 étai largable avec foc de brise et tourmentin

·         Filets de filière (notamment pour naviguer avec des petits)

·         1 feu de secours

·         Equipement de nuit (lampes flash notamment et frontales)

 

Les + sympas et vraiment utiles

 

Ils portent essentiellement sur l’aménagement du cockpit, lieu de vie par excellence.

·         Table de cockpit

·         Cadènes de fond de cockpit pour fixer un harnais (plus pratique pour le barreur aux virements de bord et permet de ne pas sortir par mauvais temps avant d’être attaché)

·         Cagnards (pour ne pas se faire rincer et protéger du vent)

·         Taud de protection solaire (quasi indispensable pour naviguer en été dans les régions chaudes)

·         Répétiteurs électroniques de cockpit

·         Haut-parleur de cockpit pour écouter la radio pendant les ¼…

 

A la rigueur

·         Capote de rouf, chère et encombrante, mais un vrai plus pour ceux qui naviguent hors saison ou de nuit

·         Le radar et autres détecteurs ne se justifient que pour la navigation au large, notamment en solitaire, ou si l’on navigue souvent dans des zones à fort trafic et à brouillards fréquents (Manche, Côte Nord Espagnole…), ou encore à forts orages (que le radar permet de bien anticiper) tels le Golfe du Lion, la Corse ou le Golfe de Gascogne.

 

Assez secondaires à mon avis en revanche, au moins dans un premier temps

·         Moteur d’annexe : souvent lourd et incommode, source de pannes, énervement et entretien supplémentaire. Ne vaut à mon avis le coup que si l’on pense faire beaucoup de mouillages dans des zones à courant type Bretagne Nord ou sujettes à de brutales a de vent, comme en Méditerranée. A noter l’apparition de modèles électriques silencieux et plus légers

·         Four : paraît réellement « too much » sur un 30 pieds, mais si cela vous vaut l’approbation de madame…

·         Centrale de navigation : fort utile certes pour optimiser ses réglages (et étendre les possibilités du pilote automatique), mais on n’est rarement à 0,15 nœuds près sur un voilier de croisière

·         Frigo : très énergivore, encombrant, mais il faut reconnaître qu’emporter de la glace est assez astreignant et coûteux à la longue. Cela étant, on peut très bien se passer de beurre, de charcuterie et de salade verte 24 ou 48 heures et n’emporter que ce qui se dégrade assez lentement (pamplemousses, oranges, pommes, radis, concombres, betteraves rouges, jambon de pays …). Sans compter le produit de la pêche. Certes la bière sera moins fraîche, à chacun d’établir ses priorités

·         Eau sous pression / eau chaude : franchement, …

·         Circuit 220V : un petit convertisseur fera l’affaire pour recharger portables et autres petits accessoires et induira beaucoup moins de risques

·         Jauges électroniques : commodes, mais pas toujours fiables

 

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